| Résumé : | Le territoire d’Imouzzer Kandar, confronté aux pressions climatiques et économiques, est le carrefour de trajectoires agricoles hétérogènes, oscillant entre des logiques d’intensification soutenues par les politiques publiques et des stratégies de diversification visant la résilience. Cette étude vise à analyser les dynamiques économiques des exploitations agricoles de ce territoire afin de déterminer dans quelle mesure elles constituent des freins ou des leviers à une transition agroécologique. Pour ce faire, une typologie des exploitations a été établie à partir de 54 enquêtes menées selon un échantillonnage non probabiliste à choix raisonné. L'approche par Analyse Factorielle des Données Mixtes (AFDM) a été utilisée pour identifier les différents types d'exploitations. Les données rétrospectives (2020-2024) ont permis de calculer des indicateurs de dynamique clés : le Taux de Croissance Annuel Moyen (TCAM) de la marge brute, le cumul de l'investissement et l'indice de diversification de Herfindahl. L’étude a identifié trois principales typologies : les exploitations en phase d’investissement post-crise (avec un TCAM moyen de 11,21 %), celles en phase de haute productivité (5 % de l'échantillon), et les systèmes pluriactifs (avec un TCAM de 22,27 %). La performance économique varie drastiquement, avec un TCAM exceptionnel de 215,06 % pour les systèmes en haute productivité, qui ont achevé leur reconversion. Les analyses de régression multiple montrent que le profil stratégique de l'exploitation (sa typologie) est le principal facteur influençant positivement la croissance économique, supplantant les facteurs structurels classiques comme la taille de l'exploitation. La décision d'investir est, quant à elle, principalement catalysée par l'accès aux subventions, qui oriente les choix vers une arboriculture intensive. La pluriactivité, stratégie adoptée par près de la moitié des exploitations, conduit paradoxalement à une plus grande spécialisation agricole (indice de Herfindahl moyen de 0,80), la résilience économique étant assurée par le revenu externe tandis que les profils en reconstruction (Type 1) utilisent la diversification comme une stratégie de résilience purement agricole. Les résultats révèlent que les subventions, bien qu'essentielles à l'investissement, créent un verrouillage socio-technique en favorisant des modèles conventionnels et spécialisés. De plus, le succès économique des systèmes les plus performants engendre un verrouillage par le succès, qui constitue un frein à la diversification agroécologique. Pour faire face à ces défis, l'étude conclut sur la nécessité de dépasser les approches uniformes et propose des pistes d'intervention différenciées, capables de déverrouiller chaque trajectoire et d'accompagner les agriculteurs vers un modèle alliant viabilité économique et durabilité environnementale. |